Indigo d'Oc

Collectif pour le design

Louis Jamin, le transfarmer qui vide vos poubelles

Presse interne

Une idée peut changer le cours de la vie. Louis Jamin, ingénieur agronome, forestier, charpentier, entrepreneur, communiquant … peut en témoigner. Aujourd’hui, président de Transfarmers, une petite entreprise de quatre amis, il commercialise depuis janvier 2019 un « Pot de fleurs composteur ». L’idée a germé il y a huit ans, sur un coin de table. 

Difficile d’imaginer son parcours. Le trentenaire lui-même s’interroge « Quand j’ai choisi de faire Prépa Bio, après un Bac S, je songeais à une carrière de vétérinaire. J’ai vite exclu de devenir véto, en ville ou à la campagne ». Quand il a opté pour AgroParisTech, en 2008, il ne s’est pas trop posé de questions. Si bien qu’en dernière année de sa formation, c’est la spécialisation « ingénieur forestier » qui l’a motivé. Après quatre ans passés chez ALCINA, un bureau d’études consacré à la gestion forestière, Louis a compris que ce travail ne serait qu’une parenthèse. « En fait, c’était le bois qui me passionnait » reconnait-il. Qu’à cela ne tienne, il deviendrait charpentier par l’apprentissage. Passant un CAP au bout d’un an, chez « Environnement bois » à Baillargues, avant de préparer un BP charpentier bois aux « Charpentiers de Paris », une SCOP gérée par l’association des Compagnons du Devoir. Après deux ans en région parisienne, s’il ne put rejoindre, à l’époque, l’Ardèche chère à son cœur, il s’enthousiasme encore de ses 18 mois passés en Dordogne. « Dans l’Atelier Férignac, j’ai vécu une expérience géniale comme charpentier et chef d’équipe ». Se revoyant bosser sur un plancher à la française au château de Chambord ou sur la charpente de l’hôtel de ville de La Rochelle. Peut-être un peu nostalgique, il confesse « Je serais bien resté. Mais j’avais envie de voler de mes propres ailes et en même temps satisfaire le besoin de ville de ma compagne »

Photo : Transfarmers

Pour lui et ses trois amis, le moment était propice pour concrétiser le projet jamais abandonné du Pot de fleurs composteur. Car, au-delà de leurs emplois respectifs, avec Thomas et Henri, passés eux aussi par AgroParisTech, et rejoints par Alliette, une graphiste, ils avaient su entretenir et enrichir l’idée de 2013. « Humainement, cette aventure est une idylle » glisse-t-il avant d’ajouter « On a toujours fait des réunions régulières sur le sujet, malgré les évolutions  de vie des uns et des autres ». Changeant de braquet, les Transfarmers, comme ils décidèrent de se nommer, sollicitent des aides de la région, intègrent l’incubateur de SupAgro, travaillent avec une stagiaire de l’INRA, spécialiste des vers de terre … La rencontre avec Romain Cuvelier, un designer prof à l’ENSCI et à Camondo, permit de créer et de fabriquer un objet abouti. Dans l’esprit du Wabi Sabi, la philosophie japonaise vantant la beauté des choses humbles et atypiques à travers leurs imperfections liées au temps et à l’usure. Si, au cours des années, les amis ont dû abandonner le premier prototype en bois pour un objet en céramique, c’est dans le but de proposer une réalisation efficace et séduisante. En allant chercher terre et liège dans la nature. Et à la poterie d’Amance, en Champagne, le savoir-faire d’une entreprise labellisée Patrimoine Vivant. Une prévente participative quatre fois plus productive qu’ils ne l’espéraient et en intégrant le BIC de Montpellier, les transFarmers ont pu commercialiser un millier de pots, cette dernière année. Même s’il reste beaucoup à faire pour produire trois fois plus.

Louis n’en oublie pas pour autant ses passions de jeunesse. Comme l’escalade qu’il pratique, entre autres, à l’Hortus et dans le massif des Ecrins. Moins risquées les activités auxquelles il participe régulièrement avec son association « Les charpentiers sans frontières » qu’une aventure récente, à 3800m d’altitude, se terminant par un sauvetage en hélicoptère !  « On fait la promotion de la charpente à l’ancienne, avec taille à la hache » se réjouit le jeune homme émacié qui participe à des chantiers bénévoles qui l’ont conduit en Roumanie, Ethiopie, Lettonie, USA, mais aussi en France. « Notre association est proche de la maîtrise d’œuvre de Notre Dame de Paris. On a réalisé en Normandie une ferme de la cathédrale, à l’échelle 1 » ajoute-t-il, avec la fierté modeste de celui qui travaille de ses mains et aime le travail bien fait. 

En dialoguant avec Louis, il n’avoue pas sa passion du voyage. Et pourtant ! Douze ans après son année de césure à AgroParisTech, passée au Pérou et au Mali, il reste en contact avec un ami malien, avec qui il a travaillé six mois pour réaliser une pépinière d’un arbuste tropical. Confiant avec attendrissement qu’il relit régulièrement « Amkoullel, l’enfant Peul », d’Amadou Hampâté Bâ. 

Revenant à la réalité d’aujourd’hui, où les défis d’un entrepreneur sont nombreux à relever, il se prépare à exposer leur création dans la vitrine de l’agence immobilière Mat et Seb, pour la France Design Week. Au-delà, lui et ses amis continuent à phosphorer sur des projets d’avenir. Il sait par expérience qu’il faut du temps pour concrétiser une idée. Qui changera peut-être une nouvelle fois sa vie !

Guy Hébert

  • www.lestranfarmers.com
  • France Design week à Montpellier : du 17 au 26 septembre, une trentaine de vitrines de l’écusson exposeront le design dans sa diversité. Dans toutes les présentations se cacheront des idées sans tabous, des savoir-faire sans frontières, des matières d’œuvre sans exclusives, des passions sans réserves … et du temps sans compter.  Cette opération,  « Les vitrines bleues », est initiée par Indigo d’Oc, un collectif de designers d’Occitanie. Le Pot de fleurs composteur dit « Le Bilobé » sera visible dans la vitrine de Mat & Seb Immobilier, 1 rue Saint Paul, 34000 Montpellier (à deux pas de l’église Saint Roch). Cette réalisation récompensera la gagnante ou le gagnant du jeu concours proposé dans le cadre de la France Design Week.